Stéphanie Rivoal, de Goldman Sachs à Ambassadrice en Ouganda
Par Stéphanie Rivoal-
Publié le : 26/03/2017
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Lecture 4 min
" Le sentiment d’être utile aux autres plutôt que de simplement s’enrichir ou enrichir sa société est particulièrement fort. "
1) Bonjour. Pourriez-vous vous présenter ?
Je suis Stéphanie RIVOAL, j’ai 45 ans, je suis mariée et j’ai trois enfants. Je vis à Kampala où j’ai l’honneur de représenter la France en étant Ambassadrice.
2) En sortant de l’ESSEC, quel était votre projet professionnel ?
Quand j’étais à l’ESSEC, j’étais dans l’association Junior Essec Conseil. Quand on passe par la « Junior », on a souvent pour projet le conseil ou la banque d’affaires. En ce qui me concerne, je voulais commencer ma carrière dans une grande banque d’affaires américaine. Mes motivations étaient la difficulté, le challenge, le prestige, la satisfaction intellectuelle et la rémunération. Je ne pensais pas du tout à ce moment-là à mon bonheur. Je ne me préoccupais pas de savoir si j’allais me plaire dans ce choix professionnel, j’étais beaucoup guidée par la représentation que se faisaient les autres de la banque d’affaires qui était convoitée à l’époque.
3) Que retenez-vous de vos expériences en banques d’affaire ?
J’ai évolué dans le milieu de la finance pendant 10 ans. J’ai rencontré des gens brillantissimes, des mathématiciens, des ingénieurs. C’était intellectuellement très satisfaisant. Et puis vivre à Londres était extraordinaire. Londres est une ville internationale où on a la chance de rencontrer des personnes de toutes nationalités.
4) Quelle analyse avez-vous faite pour trouver votre orientation après la banque d’affaires ?
J’ai été licenciée de mon premier poste dans la banque d’affaires Goldman Sachs. A ce moment précis, j’ai réfléchi pour la première fois aux moteurs de mes choix de vie. Et j’ai décidé de retourner dans ce milieu très rémunérateur pour acheter ma liberté. J’allais être une fourmi, pour ensuite être totalement libre de mes choix. Quelques années plus tard, plusieurs circonstances de vie familiale, personnelle et professionnelle m’ont mis encore une fois au pied du mur, j’ai réfléchi, je me suis complètement remise en cause et j’ ai décidé à ce moment-là de quitter la banque d’affaires et d’explorer autre chose, loin du business et de la finance. Je suis devenue photographe, puis je suis partie en mission humanitaire au Soudan.
5) Avec du recul, avez-vous des regrets ?
Aucun, j’ai passé de belles années en banque d’affaires, je suis contente d’avoir connu ce milieu et d’en comprendre les rouages. Je suis également ravie d’avoir décidé de le quitter pour faire autre chose. J’ai eu des chances inouïes ensuite, notamment celle de partir en mission humanitaire.
6) Quel regard portez-vous sur le secteur de l’associatif et l’humanitaire (ambiance, mentalité, environnement de travail…) ? Quelle(s) différence(s) majeure(s) y a-t-il avec le privé ?
Le professionnalisme est le même dans le milieu humanitaire et le secteur privé, à peu près. La grande différence est le sens de l’action. Le but n’est pas de gagner de l’argent mais de le dépenser au mieux pour aider, soulager un maximum de personnes qui souffrent. Le sens est bien plus satisfaisant personnellement. Le sentiment d’être utile aux autres plutôt que de simplement s’enrichir ou enrichir sa société est particulièrement fort.
Le milieu associatif connait les mêmes travers que toutes les sociétés humaines avec son lot de jalousies, de coups bas, etc… mais il faut dire que c’est aussi un milieu avec beaucoup d’engagement et de cœur.
7) Comment vous voyez-vous à long terme ? Au regard de vos expériences, est-il possible de retourner dans le privé ? Si oui, les expériences dans l’associatif et l’humanitaire sont-elles bien valorisées ?
Il est totalement possible de retourner dans le privé du point de vue des compétences acquises car il faut les valoriser, notamment en termes d’autonomie et de maturité. En revanche, il parait plus difficile de trouver un sens à travailler dans une société classique dont le seul but est le profit, souvent sans considération pour la santé publique, l’environnement ou la paupérisation des salariés. En ce sens, l’entreprise sociale et solidaire devrait se développer pour devenir le modèle dominant avec plusieurs buts à l’entreprise : le profit mais aussi la contribution sociétale, environnementale, l’éthique fiscale…
8) En quoi consiste votre métier d’ambassadrice ?
Je représente la France en Ouganda. Dans ce pays, je suis physiquement la France. Il y a un travail interne au sein de l’Ambassade, en gestion d’équipe et de budget mais aussi et surtout un travail de représentation, de collaboration avec les autorités locales sur des sujets nationaux, régionaux ou internationaux. Les Ambassadeurs permettent le dialogue entre les Nations et évitent des malentendus qui pourraient avec des conséquences désastreuses. De manière plus concrète, j’initie et je suis les actions de la France en Ouganda que ce soit en matière de défense, de développement ou d’action culturelle.
9) Quels conseils donneriez-vous aux jeunes pour s’orienter?
Penser en premier à ce que vous voulez vraiment faire (et pas ce que vos parents, vos professeurs, vos amis veulent pour vous), et seulement ensuite à vos diplômes ou expériences pour y parvenir. Il faut commencer par se donner un but qui donne le sens que l’on souhaite à sa vie (quel qu’il soit et sans tabou – un métier manuel est très beau par exemple) et ensuite se donner les moyens de l’atteindre. C’est seulement ensuite que l’on réajuste ses ambitions au contact de la réalité et encore seulement pour les reporter à plus tard quand les conditions seront meilleures et après avoir construit un parcours.
10) Quels conseils donneriez-vous aux professionnels souhaitant effectuer un changement de carrière ?
N’ayez pas peur de prendre des risques. La vie est trop courte pour réduire soi-même son univers des possibles. Echouer, c’est en fait grandir, apprendre et avancer. Essayer de faire un pas de cote et échouer, c’est en fait faire un grand pas en avant en apprenant beaucoup sur soi-même, donc soyez audacieux. Ensuite cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas précautionneusement se préparer notamment en faisant des calculs financiers pour assurer ses arrières.
11) Merci de vos réponses. Je vous laisse le mot de la fin (conclusion, derniers messages clés à faire passer aux jeunes, anecdotes…).
Pour moi, la seule notion universelle est la poursuite du bonheur. Chacun est différent et a des aspirations diverses, il n’y a pas un bonheur universel mais chacun a sa manière doit à la fois trouver sa place dans la société et être épanoui dans cette place.
Alors cherchez vous, ne vous laissez pas influencer, trouvez votre place, elle doit être juste, ne peut pas se faire aux dépends des autres. Et ensuite allez de l’avant, aidez autour de vous, ouvrez grands les yeux sur le monde et contribuez. C’est le sens de notre vie humaine.
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