Laurent Cervoni, Directeur IA chez Talan au parcours protéiforme
Par Laurent Cervoni-
Publié le : 17/06/2020
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Lecture 4 min
" Le cursus royal reste l’école d’ingénieur suivi d’un doctorat, mais toutes les autres approches restent tout à fait possible "
A) Parcours
1) Bonjour Laurent. Peux-tu commencer par présenter succinctement ton parcours académique ?
Bonjour. Je suis ingénieur de formation, diplômé de l’Esiee, promotion 1985. Après avoir travaillé pendant 5 ans, j’ai repris le chemin de l’école en faisant un doctorat en Intelligence Artificielle (IA). J’ai soutenu ma thèse en 1994.
2) Tu as eu depuis une riche carrière : chef d’entreprise, professeur associé à l’Insa, élu PS, administrateur d’une association, … Comment l’as-tu construite ? Y a-t-il eu un fil directeur ?
J’ai toujours été passionné par l’innovation et la technologie. J’ai donc rapidement rejoint le monde des SSII (ou ESN à présent), pour accompagner les entreprises dans leur transformation technologique. C’est ce qui m’a toujours intéressé, et c’est ce qui a structuré mon parcours professionnel. Comme j’aime également enseigner, j’ai été, en parallèle de ma carrière, Professeur associé à l’Université de Rouen puis à l’Insa. Le mariage entre mon intérêt pour la technologie et l’enseignement permet d’être en veille constante sur les Nouvelles Technologies de l’Information et de Communication (NTIC).
Après plusieurs années passées dans différentes SSII, je me suis mis à mon compte en créant ma propre entreprise, Cervoni Conseil, toujours spécialisé dans l’accompagnement des entreprises.
Actuellement, je suis Directeur IA chez Talan. En parallèle, j’interviens au sein du MBA en IA du Pôle Universitaire Léonard de Vinci à Paris.
3) Que retiens-tu de tes 18 années passées en tant que CEO de ta propre entreprise ? Penses-tu que cela soit avantageux de créer son entreprise en France ?
Créer une entreprise est une expérience très enrichissante car on est amené à travailler à tous les niveaux de la gestion d’une entreprise : comptabilité, marketing, ressources humaines, finance… C’est donc très formateur.
Créer une entreprise en France est plus facile que ce que l’on entend parfois. Cela ne prend que quelques jours et les démarches sont simplifiées.
Il faut rappeler toutefois que la France est un petit marché par rapport à d’autres pays, notamment dans le domaine technologique. Le plus difficile lorsqu’on crée une entreprise reste donc de trouver son marché.
4) En tant qu’ancien Conseiller municipal et politique en cabinet ministériel, comment est perçu, de manière générale, cet engagement en entreprise ? Est-ce un atout ?
Ce n’est pas un atout quand on est salarié d’une entreprise. Néanmoins, pour certaines professions, notamment celles qui s’exercent en libéral, ce n’est pas gênant.
De manière générale, le nombre de collaborateurs qui viennent du privé et qui travaillent en cabinet ministériel est extrêmement faible.
5) Est-il facile de passer du public au privé, et vice-versa ?
Bon nombre d’anciens collaborateurs en cabinet ministériel trouvent leur emploi dans le privé grâce aux relations qu’ils ont nouées en ministère. Néanmoins, il est beaucoup plus rare de passer du privé au public.
B) L’intelligence Artificielle
6) Peux-tu nous dire en quoi consiste ton métier chez Talan ?
Je co-dirige une équipe de 10 à 15 consultants pour accompagner les entreprises dans leurs sujets liés à l’IA. L’équipe travaille sur un large éventail de sujets. On peut citer entre autres l’octroi de prêts bancaires, ou encore plus récemment, la détection automatique du port du masque par traitement vidéo.
7) Quelle réalité se cache derrière le terme « IA » ?
Historiquement, c’est un terme qui remonte aux années 1950. A l’origine, c’était une conjecture – j’insiste sur ce mot – selon laquelle toutes les fonctions cognitives de l’être humain pouvaient être reproduites par ordinateur. Depuis, on s’est rendu compte que ce n’était pas aussi simple, ne serait-ce, par exemple, parce qu’un ordinateur ne peut pas comprendre ou percevoir toutes les émotions.
Dans les années 90, on utilisait plutôt le terme d’ « informatique avancé » car l’IA était surtout un outil informatique dédié à une seule et unique tâche.
Depuis les années 2010, l’IA est de retour sur le devant la scène pour 3 raisons : l’augmentation de la puissance des machines permettant aux algorithmes de mieux tourner, la disponibilité des données, et leur grande quantité.
A l’heure actuelle, des briques d’IA font déjà parti de notre quotidien. Parmi elles, l’auto-completion dans les mails par exemple, la reconnaissance vocale de Siri…
8) Quelles formations conseillerais-tu pour travailler dans ce domaine ? Ta thèse en IA réalisée dans les années 90 te sert-elle ?
La diversité des organismes de formation en IA est large, il est donc difficile de n’en donner qu’un. Le cursus royal reste l’école d’ingénieur suivi d’un doctorat, mais toutes les autres approches restent tout à fait possible, et ce, quel que soit son âge. Certains n’hésitent pas à se reconvertir dans l’IA. Dans mon équipe, une collègue qui vient du monde du bâtiment, d’autres sont plus techniques ou issus d’écoles de commerce. Il y a également des linguistes qui travaillent sur l’analyse du langage. Au final, les parcours sont très variés. Dans le cas où l’on souhaite faire de la technique, il est préférable d’avoir une double compétence à la fois en mathématiques et en informatique.
9) Penses-tu que ce soit un secteur d’avenir en termes de recrutement ? Résiste-t-il à la crise économique liée au Covid-19 ?
Le secteur de l’IA va continuer à recruter dans les années à venir. C’est un secteur d’avenir même s’il n’est pas totalement mature, tant sur le plan technologique que juridique. De fait, les métiers vont s’affiner au fil du temps. Actuellement par exemple, on s’intéresse beaucoup au traitement du langage.
L’IA ne va pas contribuer forcément à détruire des emplois en masse, car l’expertise humaine restera nécessaire. Un outil d’IA peut détecter un mélanome, mais c’est le médecin qui aura décidé de lancer l’examen.
Le Covid-19 a contribué à accélérer et tester de nouveaux outils d’IA, comme les simulations pour évaluer l’efficacité de nouveaux médicaments. Attention néanmoins, il ne faut pas tout attendre de l’IA : elle ne va pas sauver la planète.
C) Conseils
10) Quels conseils donnerais-tu pour travailler dans l’IA ?
L’IA est un domaine où il faut être passionné car il exige de s’intéresser à beaucoup de choses en parallèle. L’IA étant au croisement de nombreux domaines, on ne peut pas se focaliser sur un seul aspect. Il est plus intéressant d’être polyvalent.
11) Quelle est la leçon de vie la plus importante que tu ais apprise au cours de ta carrière ?
L’Intelligence Artificielle est le sujet par lequel j’ai commencé ma carrière. Le sujet a ensuite pratiquement disparu avant de revenir 20 ans plus tard. Rien n’est écrit à l’avance, on ne sait jamais de quoi l’avenir sera fait. La vie professionnelle est ponctuée d’aléas, on fait beaucoup de métiers différents, et tant mieux.
Il est également important de se faire plaisir et j’ai la chance de travailler dans un domaine qui me plaît.
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