Geneviève Broutechoux, surdouée en entreprise
Par Geneviève Broutechoux-
Publié le : 21/05/2015
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Lecture 3 min
Avoir un cerveau qui fonctionne est à double tranchant. Il faut savoir bien s’en servir pour trouver sa place dans le monde du travail.
1) Bonjour Madame Broutechoux. Pourriez-vous vous présenter ?
Bonjour. Après le baccalauréat, je ne savais pas trop quoi faire. Je n’avais pas une très bonne image de moi-même car je me percevais comme quelqu’un de « bête ». En revanche, je savais que j’avais un attrait pour la culture et l’art, au sens large du terme. Je me suis donc orientée vers des études de musique. Au bout de quelques années, j’ai trouvé qu’il était très dur de gagner sa vie dans la culture, d’autant plus que je manquais terriblement de confiance en moi. J’ai finalement décidé de me réorienter et j’ai intégré le MBA à HEC. Par la suite, un ami HEC qui avait monté une société d’études m’a embauchée pour y faire des études qualitatives. Il s’intéressait beaucoup aux média et au rapport son-image, et en qualité de musicienne, c’était passionnant. Le métier des études m’a tout de suite plu car il faut réfléchir et analyser constamment. J’ai donc continué dans cette fonction notamment chez TNS à Londres, en marketing grande consommation.
2) Pourquoi avoir voulu travailler à Londres ?
En fait, mes expériences en entreprise en France ont souvent été très frustrantes, pour des raisons relationnelles et culturelles. En France, la culture du travail est très codifiée, on attend de vous un certain comportement, et surtout on valorise la confiance en soi. Ayant un profil atypique, j’ai eu du mal à m’intégrer car, disons-le, dans une entreprise française, il y a un certain rôle à jouer : il faut se mettre en scène, bien (se) présenter etc. J’ai beaucoup de mal à faire ce genre de choses.
J’ai donc choisi de m’expatrier et j’ai rejoint Londres : la culture au travail y est plus pragmatique et plus humble. Ça permet une meilleure solidarité entre collègues, et souvent moins de stress. A ce titre, je m’y suis donc plus épanouie. Je ne suis pas la seule… Londres est plein de Français qui ne réussissent pas ou plus à travailler dans une entreprise française.
3) Quand avez-vous été diagnostiquée surdouée ?
Cela ne fait pas très longtemps, trois ou quatre ans tout au plus. Suite à cela, j’ai intégré l’association MENSA à Londres ; pour moi, c’était avant tout un moyen de me faire des amis.
4) A quoi reconnaît-on un surdoué ?
Je ne sais pas trop. Beaucoup d’articles ont été écrit à ce sujet. De ma propre expérience, je dirais que beaucoup de surdoués se sentent en décalage avec le reste du monde car ils ont une forme d’intégrité parfois candide, une difficulté à jouer un rôle social qui n’est pas le leur et enfin, une curiosité sans limites et une aversion pour l’ennui.
5) Quelles difficultés rencontrent les surdoués au travail ?
De ma propre expérience, j’ai toujours éprouvé des difficultés dans les relations humaines. J’ai une grande timidité, voire une phobie sociale dans certaines situations, ce qui m’a nuit dans ma vie professionnelle mais également privée. Je suis consciente que tous les surdoués ne rencontrent pas forcément ce problème, mais je pense qu’ils sont très nombreux dans ce cas. Certains ne semblent pas avoir de problème, la vie a l’air de leur réussir… C’est plus une question d’individu.
6) Vers quels métiers s’orientent en général les surdoués ?
Il me semble que beaucoup s’orientent vers des métiers scientifiques… il y a pas mal de profils genre « geek ». L’avantage est qu’il y a moins besoin d’interagir avec d’autres personnes. On est donc plus apte à se concentrer sur ce qu’on a à faire que ce qui nous entoure. Il y a également pas mal d’enseignants, des professions artistiques…En revanche, beaucoup de surdoués sont au chômage et peinent à s’insérer dans le monde professionnel, ce que je trouve très choquant.
7) Quels conseils donneriez-vous aux surdoués pour s’épanouir en entreprise ?
Je n’ai pas vraiment de conseils à leur donner. Déjà, savoir qu’on est surdoué, ça aide beaucoup. Il y a pas mal de livres sur la question, ça permet de mieux comprendre, s’accepter, et être en paix avec soi-même.
8) Faut-il dire à ses collègues qu’on est surdoué ?
Non surtout pas car c’est encore quelque chose de très mal compris. D’abord le terme « surdoué » est à mon avis très mauvais… Ça peut sous-entendre qu’on se juge intellectuellement supérieur aux autres ce qui sera souvent mal accepté. Or, je ne me sens en aucun cas supérieure. Peut-être peut-on le dire à la limite lors d’un entretien avec un recruteur, et encore… Pour moi, un QI très élevé est surtout signe d’hypersensibilité, donc de vulnérabilité; sauf que j’ai rencontré des gens très intelligents qui ne semblaient pas hypersensibles, et inversement…
9) Merci pour votre témoignage. Je vous laisse le mot de la fin.
Avoir un cerveau qui fonctionne est à double tranchant. Il faut savoir bien s’en servir pour trouver sa place dans le monde du travail. En revanche, quand on est « HQI », je pense que c’est vraiment important de le savoir… Bon courage à toutes et à tous !
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