Vincent, double diplôme Centrale Stanford
Par Vincent-
Publié le : 26/08/2013
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Lecture 7 min
1)Bonjour Vincent. Pourriez-vous commencer par vous présenter ?
Bonjour. Je me suis orienté très tôt vers des études d’ingénieurs. Après une terminale scientifique, je suis allé en classe préparatoire MPSI puis MP. J’ai passé ensuite les concours et j’ai intégré Centrale Paris, une école d’ingénieurs généraliste.
La scolarité à Centrale se fait en 3 ans. La première année et le 1er semestre de la 2ème année sont en tronc commun à Paris. Ce n’est qu’au bout de la 3ème année qu’on choisit sa spécialité : énergie, finance, mécanique ….
Pour ma part, j’ai choisi en dernière année de faire un double diplôme à Stanford University dans le Master Mechanical Engineering. C’est un Master qui agrège plusieurs domaines : design de produits, mécanique pure et dure, mécanique des fluides… J’ai choisi la spécialité système énergétique.
Je suis actuellement en stage dans une grande entreprise industrielle qui fabrique des automobiles. J’y analyse les données informatiques (Big Datas) pour aider les ingénieurs à concevoir les futurs véhicules électriques.
2) Comment avez-vous choisi votre école d’ingénieur ?
J’ai choisi Centrale Paris parce que outre le fait que ce soit une bonne école, ils sont très axés sur l’international. L’école exige par exemple des étudiants qu’ils fassent au moins 6 mois à l’international pendant leur scolarité (échange universitaire ou stage à l’étranger).
Les autres écoles d’ingénieur comme les Mines de Paris par exemple sont beaucoup moins axées sur l’international.
A Stanford, les autres ingénieurs français avec moi sont principalement issus de Centrale ou de Polytechnique.
3) Pourquoi avoir choisi de faire Stanford en plus de Centrale Paris ?
J’avais déjà vécu aux Etats-Unis et en Martinique étant plus jeune et cela m’avait beaucoup plu. Le double diplôme répondait à mon envie de voyager, de voir autre chose que la France et de découvrir de nouvelles cultures.
4) Est-il difficile d’intégrer le double diplôme Centrale Paris et Stanford ?
Le double diplôme est très sélectif car il se fait en deux temps :
– d’abord en interne à Centrale Paris : ce sont les résultats de la première année qui déterminent si on peut ou pas postuler au double diplôme.
– si c’est le cas, on postule à l’université qu’on veut intégrer en deuxième année. A savoir qu’il faut aussi passer le GRE (ndlr : Graduate Record Examinations) qui teste le niveau en mathématiques et en anglais. Il faut ensuite rédiger une lettre de motivation et un CV. Enfin, l’université exige trois lettres de recommandation (c’est une demande très courante aux Etats-Unis). Il faut donc solliciter ses anciens professeurs.
Mon école d’ingénieur bénéficie d’un bon réseau à Stanford et y est donc plus ou moins connue. Mais le réseau ne suffit pas car l’université recrute les meilleurs élèves.
Nous avons été 6 à intégré le double diplôme Centrale-Stanford. Sur ces 6, un n’avait pas vraiment un bon dossier mais il avait une lettre de recommandation d’un prix Nobel ce qui l’a beaucoup aidé pour être accepté. Cela montre l’importance des lettres de recommandation.
5) Comment avez-vous choisi votre université d’accueil pour le double diplôme ? Aviez-vous un bon dossier ?
J’étais très tôt intéressé pour faire un double diplôme. J’ai postulé dans 3 universités : le MIT (ndlr : Massachusetts Institute of Technology), Princeton et Stanford. J’ai postulé que dans trois universités car l’envoi de candidature prend du temps. Néanmoins, je conseille aux étudiants de postuler dans beaucoup plus d’universités pour augmenter leurs chances d’être pris.
J’avais un relativement bon dossier en première année à Centrale. J’étais le deuxième de ma promotion. J’ai eu la chance d’être accepté aux trois universités auxquelles j’ai postulées. Les trois écoles étant globalement de niveau égal, j’ai finalement choisi Stanford parce que j’avais déjà vécu pendant mon enfance sur la côte Est des Etats-Unis. J’avais également plus d’affinités avec cette université. Le climat y a, entre autres, contribué. Je ne regrette pas du tout ce choix. J’y ai passé un an et demi au total.
6) Quels sont les coûts d’un double diplôme aux Etats-Unis ?
Il faut payer les frais de scolarité de l’université aux Etats-Unis qui coûtent très chers. Le prix dépend des « Units » qu’on prend. A chaque cours sont attribués un nombre de Units. En Engineering à Stanford, une Unit coûte environ 900 dollars. Par trimestre, on en a environ pour 9 500 dollars de frais de scolarité auquel il faut ensuite ajouter le logement, la nourriture, la sécurité sociale etc.
7) Comment avez-vous financé votre scolarité à Stanford ?
Mes parents m’aident un peu financièrement mais ce n’est pas suffisant.
La solution, et c’est celle que la plupart des étudiants choisissent, est de contracter un prêt à la banque. En général, on n’a aucun mal à obtenir un prêt étudiant avec un faible taux d’intérêt, même en période de crise. Les banques n’hésitent pas à prêter pour des études dans de bonnes universités américaines.
Il faut également savoir qu’aux Etats-Unis, il y a ce qu’on appelle les « fellowship » : l’université paye les frais de scolarité à un étudiant. En général, les étudiants qui reçoivent cette aide sont brillants (par exemple les majors de leur promotion), et c’est plutôt réservé aux Américains. Même si on reçoit un fellowship d’une université moins « réputée », je conseille aux étudiants de bien réfléchir à cette offre car elle est plutôt rare et difficile à avoir.
Un conseil également pour les étudiants : plutôt que de prendre les assurances aux Etats-Unis, il vaut mieux prendre celle de la SMEREP qui est beaucoup moins onéreuse. Elle s’appelle « World Pass ».
8) Vous avez été Teaching Assistant à Stanford. Pourquoi ce choix ?
C’était pour financer mes études car c’est un job bien rémunéré. Les professeurs aux Etats-Unis ont besoin de mains pour les aider dans leurs travaux de recherche. Ils recrutent donc des étudiants en tant que Teaching Assistant ou Research Assistant.
En tant que Teaching Assistant en physique pour les Undergrade (ndlr : équivalent des étudiants de bac à bac+4 aux Etats-Unis), je faisais 10 heures de cours par semaine en échange d’un salaire et d’une réduction de mes frais de scolarité. On est rémunéré par le nombre de Units.
J’ai fait ce job pendant 2 trimestres sur 5. J’ai été payé en tout 12 000 dollars (4000 dollars pour le premier trimestre puis 8 000 dollars pour le second) et mes frais de scolarité de deux trimestres étaient payés par l’université. Ce job permet donc de couvrir les dépenses.
Tout compris (études, logement, nourriture etc), et sans TA, la scolarité à Stanford peut coûter environ 60 000 dollars en un an et demi.
9) Comment avez-vous vécu votre expérience en tant que Teaching Assistant à Stanford ? Les étudiants sont-ils réceptifs malgré votre jeune âge et au fait que vous soyez étranger ? Le niveau est-il élevé ?
Il n’y a eu aucun soucis. La seule difficulté est qu’on a beaucoup de travail car il faut préparer les cours en plus de corriger les copies. Cela prend beaucoup de temps.
Etant donné que j’avais fait une prépa MP, le niveau était très accessible.
Les élèves étaient très réceptifs durant mes cours. Il y avait une bonne ambiance. Les élèves étaient plus enclins à me parler plutôt qu’à un autre professeur plus âgé et qui n’est pas forcément disponible.
10) Votre parcours est-il atypique ou est-ce que beaucoup d’autres étudiants ont fait le même choix que vous (partir un an en échange universitaire et enseigner tout en étant encore étudiant) ?
Non, de manière général, c’est plutôt commun. Mais il faut bien se débrouiller pour trouver les professeurs qui ont besoin d’un assistant. Il faut ensuite faire toutes les démarches requises pour solliciter les professeurs.
Les étudiants en fellowship ne le font pas étant donné que leur scolarité est payée. Pour les autres étudiants, la principale motivation pour faire ce job est d’avoir un salaire pour financer leurs études.
11) Qu’ont fait les étudiants de votre promotion à Stanford ?
Parmi les 6 français de mon école avec moi, deux ont opté pour le PhD. Une autre est en stage dans une entreprise industrielle spécialisée dans les voitures électriques haute gamme. Enfin, les deux derniers sont rentrés en France car ils étaient spécialisés dans l’aérospatial. Pour exercer dans ce domaine aux Etats-Unis, la nationalité américaine est nécessaire.
12) Votre parcours brillant s’inscrit-il dans un projet professionnel précis ? Si oui, lequel ?
Je ne suis pas vraiment un exemple à suivre car je n’ai pas d’idée encore bien précise de ce que je veux faire plus tard. Mes parents sont tous les deux ingénieurs et comme j’aimais les mathématiques et la physique, c’est tout naturellement que je suis allé en terminal scientifique. Mon dossier au lycée m’a permis d’entrer en classe préparatoire MP. C’est une bonne formation qui permet d’ouvrir de nombreuses portes.
A Centrale Paris, j’ai choisi des cours orientés vers l’énergie (nucléaire, énergies renouvelables, etc). Mon Master à Stanford en Mechanical Engineering s’inscrivait dans cette continuité. J’ai également effectué un stage chez Areva Solar.
J’ai donc construit mon parcours professionnel au fur et à mesure et non pas avec un objectif bien précis en tête dès le début.
13) Quels choix vous sont offerts à la sortie d’une école d’ingénieur ?
En entrant en école d’ingénieur, on peut vraiment tout faire.
Le premier secteur où s’orientent les étudiants est l’énergie. Vient ensuite la finance, l’audit et le conseil car ce sont des secteurs rémunérateurs et où on peut continuer à faire des mathématiques. Il y a ensuite le BTP (ndlr : Bâtiment, Travaux Publiques) et un peu la R&D (ndlr: Recherche & Développement). Certains de ma promotion ont également choisi de monter leur entreprise. Il y a un incubateur à Centrale Paris.
14) Vers quel métier pensez-vous vous orienter ?
Dans la Silicon Valley, il y a beaucoup de starts-up spécialisées dans l’innovation technique. C’est un environnement très compétitif. Je voudrais au début évoluer sur une fonction d’ingénieur développement / R&D puis plus m’orienter vers une fonction managériale.
Dans l’idéal, je voudrais travailler quelques années aux Etats-Unis puis rentrer en France. Dans la pratique, je ne pense pas que cela sera possible pour des raisons personnelles. A noter qu’il est également difficile d’obtenir le Visa travail aux Etats-Unis.
15) Au vue de votre expérience en tant que Teaching Assistant, vous placez-vous dans la perspective de faire une thèse ?
Non, pas vraiment. Faire une thèse ne m’intéresse pas plus que cela. J’ai fait de la recherche pendant un trimestre et cela ne m’a pas spécialement plu. Il y a trop de temps de latence, de temps perdu en recherche. Si je devais faire de la recherche, je la ferai en recherche appliquée. C’est plus valorisé et plus valorisant.
En France, les étudiants ne sont pas du tout poussés vers la recherche. On a encore une image négative du chercheur.
Toutefois, aux Etats-Unis, la thèse (le PhD) est très valorisée. Beaucoup d’étudiants à Stanford ont même choisi d’en faire une alors que ce n’était pas leur objectif premier avant de partir.
16) Quels conseils donneriez-vous aux étudiants pour choisir leur premier métier ?
Il vaut mieux commencer par le métier où ils se sont spécialisés pendant leur cursus scolaire quitte à changer après deux ans plus tard.
Les entreprises exigent de leurs jeunes diplômés d’avoir de l’expérience. Il vaut mieux donc prendre un métier où on en a déjà pour être plus facilement recruté.
17) Au final, sur quels critères se fonde-t-on pour choisir son métier lorsqu’on peut tout faire ?
Le critère le plus décisif est de faire ce qu’on aime, ce par quoi on est vraiment intéressé. Ensuite, outre le domaine d’intérêt, il faut bien prendre en compte l’environnement où on évolue. Si on a un goût prononcé pour l’innovation et les nouvelles technologies, la Silicon Valley est le lieu parfait pour évoluer.
18) Merci pour votre témoignage. Je vous laisse le mot de la fin.
Je n’ai aucun regret sur mon parcours. Le choix d’avoir fait un double diplôme a été une expérience fantastique. Vouloir étudier dans une université américaine pour des raisons financières n’est pas un choix judicieux.
Si on veut travailler à court moyen terme à l’étranger, le double diplôme sera utile. Néanmoins, si on veut rester en France, ça l’est un peu moins car Stanford n’apporte rien de plus à Centrale Paris. Au final, j’aurais autant apprécié mon échange aux Etats-Unis que dans un autre pays.
Pour ce qui est de la construction de son parcours, on peut le faire petit à petit en testant les cours pour voir si le domaine est intéressant. Il faut aussi choisir son style de vie. Si on veut travailler dans le Conseil en Stratégie par exemple, il faut être prêt à avoir de gros horaires.
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